Occidents Grand Palais, 2008

Installation photographique et mur modulé

L’image est une présence qui tout à la fois nous inclue et nous exclue et cette œuvre de Jocelyne Alloucherie joue sur ces deux niveaux. Le cadre qui généralement entoure l’image est là, non seulement pour attester du cadrage qui a été choisi mais surtout pour renforcer un paradoxe : il est à la fois une structure d’accueil mais aussi un seuil qui crée une distance. C’est ainsi que toute photographie a une présence intérieure autant qu’extérieure.  De ce rapport d’inclusion et d’exclusion peuvent naître l’étrangeté comme la familiarité, la généralité comme la singularité. En agrandissant au maximum les portions de rue qu’elle a prises à New York, Jocelyne Alloucherie montre que chacune de ces images singulières peut devenir équivalente à l’autre et se fondre dans la généralité.  En perdant les détails qui les caractérisent, par la répétition des mêmes points de vue, des moments identiques, tôt le matin ou tard le soir,  elles  font apparaître leur structure profonde, une organisation de l’espace très ancienne et particulière à la pensée occidentale.  Il n’y a pas de suite linéaire entre elles, pas d’histoire ou de développement particulier. Il s’agit simplement d’une juxtaposition de points de vue, de perspectives redondantes et pourtant toujours différentes.

Le rapport entre le cadre et l’image est aussi une invitation au spectateur. C’est nous-même qui devons le mettre en application par notre regard et par notre parcours à travers la pièce. Ce déplacement de notre corps nous permet d’entrer dans la profondeur du champ de l’image et à nous en retirer, comme nous le souhaitons.

L’absence de narration et cette liberté qui nous est accordée ici par l’artiste nous confronte alors à la l’idée de durée et de persistance. 

Texte de Françoise Paviot  édité dans les Transphotographiques, Lille, 2007